Section 1.2

Connecteurs

Jusqu'à présent, nous avons vu comment former des propositions simples à l'aide de variables propositionnelles et de constantes. Dans cette section, nous allons découvrir comment former des propositions plus complexes en combinant des propositions. Pour combiner des propositions, nous allons utiliser ce qu'on appelle des connecteurs. Un connecteur permet de lier des propositions entre elles pour n'en former qu'une seule. Le résultat de la combinaison de propositions est une nouvelle proposition dont le sens est déterminé par le connecteur utilisé et les propositions combinées.

♣︎ Exemple

Imaginons que nous ayons deux variables propositionnelles G et R, auquel on peut attribuer le sens, par exemple, de respectivement « Le fruit est grand. » et « Le fruit est rouge. ».

À l'aide d'un connecteur logique comme le et, nous pouvons combiner les deux propositions pour former une nouvelle proposition G et R. Cette dernière exprime que « Le fruit est grand et le fruit est rouge. », ou encore, plus simplement « Le fruit est grand et rouge. ».

Les connecteurs que nous allons voir sont la négation (le non), la conjonction (le et), la disjonction (le ou) et finalement l'implication (le implique).

Négation

La négation est un connecteur qui permet d'obtenir l'inverse d'une proposition. Étant donné une proposition p, on note non p la négation de p. On utilise parfois la notation ¬p ou encore p pour dénoter une négation.

! Remarque

Dans le paragraphe précédent, nous avons utilisé une lettre minuscule, en l'occurence p, pour représenter une proposition arbitraire. Cette lettre représente ce qu'on appelle une méta-variable. Il s'agit simplement d'un moyen de faire référence une proposition arbitraire en lui donnant un nom, ici p. Il peut s'agir d'une proposition basique comme une variable ou une constante, voire même d'une proposition plus complexe, elle-même composée de propositions plus simple combinées par des connecteurs.

La négation d'une proposition énonce son contraire : La négation d'une proposition est vraie si et seulement si la proposition originale est fausse.

♣︎ Exemple

En admettant que la variable R signifie « La Terre est ronde. », la proposition non R énonce que « La Terre n'est pas ronde. ». La proposition non R est vraie quand R est fausse, et est fausse quand R est vraie.

Conjonction

La conjonction est un connecteur qui permet d'affirmer la véracité de deux propositions en même temps. Étant donné deux propositions p et q, on note p et q la conjonction de p et de q. On utilise parfois la notation p ∧ q, ou encore p ⋅ q, pour noter la conjonction de p et de q.

La conjonction de deux propositions énonce que les deux propositions sont vraies. La conjonction résultante est elle-même une proposition. Cette proposition est vraie si et seulement si les deux propositions sont vraies.

♣︎ Exemple

Admettons que la variable R signifie « La Terre est ronde. » et que la variable B signifie « Le Soleil est bleu. ». La proposition R et B énonce que « la Terre est ronde et le Soleil est bleu. ». La proposition est vraie uniquement dans le cas où les deux sous-propositions (c'est-à-dire la proposition R et la proposition B) sont vraies.

Disjonction

La disjonction est un connecteur qui permet d'affirmer la véracité d'au moins une parmi deux propositions. Étant donné deux propositions p et q, on note p ou q la disjonction de p et de q. On utilise parfois la notation p ∨ q, ou encore p + q, pour référer à la disjonction de p et de q.

La disjonction de deux propositions énonce qu'au moins une des deux propositions est vraie. Tout comme pour la conjonction, la disjonction résultante est elle-même une proposition. Cette proposition est vraie si et seulement si l'une ou l'autre des deux propositions est vraie. Dans le cas où les deux propositions sont vraies, la disjonction est elle aussi vraie.

♣︎ Exemple

Admettons que la variable R signifie « L'objet est rouge. » et que la variable C signifie « L'objet est carré. ». La proposition R ou S énonce que « L'objet est rouge ou l'objet est carré. ». La proposition est fausse dans le cas où les deux sous-propositions sont fausses, et uniquement dans ce cas.

Implication

Le dernier connecteur que nous allons voir à présent est l'implication. L'implication est un connecteur qui permet d'affirmer que quand une première proposition est vraie alors la seconde l'est aussi. Étant donné deux propositions p et q, on note p implique q l'affirmation que quand la proposition p est vraie, alors il se trouve aussi que la proposition q est vraie. Autrement dit quand on a p, alors on a forcément q. On note parfois p → q voire p ⇒ q pour dénoter une implication.

On appelle l'impliquant la proposition de gauche d'une implication, et on appelle l'impliqué la proposition de droite.

L'implication est un moyen d'exprimer des affirmations de la forme « Si p alors q. » ou « Quand p alors q. ». Quand l'impliquant p est vrai, l'impliqué q doit être vrai afin que l'implication soit vraie. Quand la proposition p est fausse, l'implication sera toujours vraie, peu importe la valeur de vérité de q.

Une implication p implique q est donc vraie lorsque l'impliquant est faux ou lorsque l'impliqué est vrai. Le seul moyen qu'une implication p implique q soit fausse est que la proposition p soit vraie et que la proposition q soit fausse.

♣︎ Exemple

Soit la variable P qui signifie « Il pleut. » et la variable B qui signifie « Je prends mes bottes. ». La proposition P implique B énonce que « Quand il pleut, je prends mes bottes. ». L'énoncé est vrai dans le cas où il pleut et que je prends mes bottes, mais aussi dans le cas où il ne pleut pas, que je prenne ou non mes bottes. Le seul cas où l'énoncé est faux est celui où il pleut et où je ne prends pas mes bottes.

L'implication est un connecteur qui peut être relativement difficile à saisir. Il est important de comprendre que l'implication ne dénote pas une relation de cause à effet. L'implication ne signifie pas que la proposition de droite est la conséquence de la proposition de gauche. L'implication signifie simplement que la proposition de droite est vraie lorsque la proposition de gauche est vraie. On ne s'intéresse pas aux raisons pour lesquelles la proposition de droite est vraie.

♣︎ Exemple

Soit la variable C qui signifie « Il a le permis de conduire. » et la variable M qui signifie « Il est majeur. ». La proposition C implique M énonce que « S'il a le permis de conduire, il est majeur. ». Le fait qu'une personne ait le permis de conduire n'est pas la cause du fait qu'elle soit majeure. On énonce simplement que si une personne a le permis de conduire, alors elle est majeure. Autrement dit, on énonce qu'il n'est pas possible qu'une personne ait le permis de conduire sans être majeure.

Mélanger les connecteurs

Nuage de connecteurs.

Il me semble important de clarifier qu'il est possible de combiner tous les connecteurs que nous avons vu jusqu'à présent pour former des propositions. Lorsque nous formons une proposition, nous ne sommes pas limité à utiliser un seul connecteur. Une proposition peut être construite à l'aide de plusieurs connecteurs.

Lorsque nous écrivons des propositions à l'aide de plus d'un connecteur, l'ordre d'application des connecteurs est important. Comme pour les expressions arithmétiques, où la multiplication est prioritaire sur l'addition, il est important de respecter l'ordre d'application des connecteurs. Nous allons adopter la convention suivante pour l'ordre d'application des connecteurs : Le connecteur non a la priorité sur le et, qui a la priorité sur le connecteur ou, qui a la priorité sur le connecteur implique.

♣︎ Exemple

Admettons que la variable R signifie « La Terre est ronde. » et que la variable B signifie « Le Soleil est bleu. ». La proposition R et non B énonce que « la Terre est ronde et le Soleil n'est pas bleu ». La proposition fait usage de la conjonction et de la négation.

Tout comme vous en avez certainement l'habitude en mathématiques, il est possible d'utiliser des parenthèses pour définir (ou clarifier) l'ordre d'application des connecteurs. Je ferais mon possible pour utiliser des parenthèses même si elles ne sont pas strictement nécessaires afin de clarifier l'ordre d'application des connecteurs.

♣︎ Exemple

Admettons que la variable R signifie « La Terre est ronde. » et que la variable B signifie « Le Soleil est bleu. ». La proposition non (R et Q) énonce qu'« Il n'est pas vrai que la Terre est ronde et le Soleil bleu. », autrement dit que « La Terre n'est pas ronde ou le Soleil n'est pas bleu. ».

La proposition a un sens très différent de la proposition non R et non B qui énonce que la « Terre n'est pas ronde et le Soleil n'est pas bleu. ».

Aussi, lorsqu'on utilisera plusieurs fois le même connecteur à la suite, on adoptera la convention que les parenthèses sont mises à droite en l'absence de parenthèses explicites. Ainsi, pour trois propositions p, q et r, la proposition p implique q implique r correspondra à la proposition p implique (q implique r), et non à la proposition (p implique q) implique r. Techniquement, on dit des connecteurs qu'ils associent à droite.

! Remarque

Pour le connecteur et et le connecteur ou, l'ordre d'application importe peu. En effet, que l'on écrive (p et q) et r ou alors p et (q et r), le résultat sera toujours le même. On dit que ces opérateurs sont associatifs.

De même, pour les opérateurs et et ou, l'ordre d'apparition importe peu. En effet, que l'on écrive p ou q ou alors q ou p, le résultat sera identique. On dit que ces opérateurs sont commutatifs.

Représentation en arbre

Un arbre à l'envers.

Afin de mieux visualiser les propositions et leur structure, il est possible de les représenter graphiquement sous forme de ce qu'on appelle un arbre syntaxique. On parle d'arbre car la structure utilisée ressemble à celle d'un arbre naturel, si ce n'est que nos arbres seront orientés à l'envers, vers le bas. L'adjectif syntaxique fait référence à la syntaxe, une branche de la linguistique qui étudie la structure des phrases.

L'arbre syntaxique d'une proposition permet de voir la structure de la proposition, c'est-à-dire de voir comment les connecteurs sont utilisés.

Afin d'illustrer ce concept, prenons pour exemple la proposition A et ((non B) ou vrai). L'arbre syntaxique de cette proposition est le suivant:

L'arbre syntaxique qui représente la proposition est composé de noeuds et de branches:

  • Les noeuds contiennent les connecteurs, les variables et les constantes.
  • Les branches sont les lignes qui relient les noeuds entre eux.
Les noeuds sont placés de manière hiérarchique selon l'ordre d'application des connecteurs. Les noeuds des connecteurs sont placés au-dessus des noeuds sur lesquels ils s'appliquent et y sont reliés par des branches. À chaque niveau, l'ordre gauche-droite des noeuds respecte l'ordre d'apparition dans la proposition.

Le noeud le plus en haut de l'arbre est appelé la racine de l'arbre, et les noeuds les plus bas sont appelés les feuilles. Les noeuds en dessous et reliés à un noeud par une branche sont appelés ses enfants. L'unique noeud en dessus et relié à un noeud par une branche est appelé son parent. À noter que la racine n'a pas de parent, et que les feuilles n'ont pas d'enfants.

Remarquez que sous cette forme graphique, il n'y a plus besoin de faire usage de parenthèses. Cette représentation nous sera utile par la suite, notamment pour visualiser comment calculer la valeur d'une proposition.

À essayer

Entrez une proposition dans le champ de texte ci-dessous et cliquez sur le bouton Afficher pour afficher l'arbre de cette proposition.

Auto-évaluation

On utilise le connecteur pour combiner deux propositions en une seule proposition qui affirme que les deux sont vraies.

On utilise le connecteur devant une proposition pour former une nouvelle proposition qui affirme le contraire de la proposition initiale.

On utilise le connecteur pour combiner deux propositions en une seule proposition qui affirme qu'au moins une des deux est vraie.

Finalement, on utilise le connecteur pour combiner deux propositions en une seule proposition qui affirme que lorsque la première proposition est vraie, la seconde proposition doit aussi l'être.

Auto-évaluation

La proposition p et q dénote une , tandis que la proposition p ou q dénote une .

La proposition p implique q dénote une .

Auto-évaluation

Le seul moyen qu'une implication p implique q soit fausse est que la proposition p soit et que la proposition q soit . Une implication est vraie si l'impliquant (ici p) est ou si l'impliqué (ici q) est .

Auto-évaluation

Représenter une proposition sous forme d'arbre , permet de mettre en évidence la d'une proposition.

L'arbre d'une proposition est composés de et de .

On appelle le noeud tout en haut de l'arbre la de l'arbre, tandis que les noeuds tout en bas de l'arbre sont appelés les .

! À maîtriser

Avant de poursuivre, assurez-vous de pouvoir :

  • Lister les différents connecteurs logique.
  • Expliquer le sens des différents connecteurs logiques.
  • Comprendre le sens de propositions logiques formées de connecteurs.
  • Représenter une proposition sous forme d'arbre.
  • Déterminer la proposition représentée par un arbre.